Fin janvier, nous avons organisé deux séances d’information et de débat sur la sexualité des adolescents, la première avec les filles, la seconde avec les garçons. Les séances ont été animées par Cécile, major au CHU, et Aïcha, médecin.
25 jeunes bénéficiaires y ont participé.Ils ont posé beaucoup de questions, dans une ambiance détendue et conviviale. Les jeunes ont beaucoup de préjugés, influencés par les croyances traditionnelles. Plusieurs filles ont déjà pratiqué des avortements. Nous avons également noté la grande réticence des garçons à utiliser des préservatifs.
Pour faire peut-être évoluer les mentalités, nous devons avoir une action continue sur ces questions.
Nous présentons dans la suite de cette page les situations concrètes de quelques bénéficiaires ayant un grand retard scolaire. Notre objectif est de vous permettre de mieux cerner les difficultés auxquelles nous sommes confrontés. Et aussi les limites de nos interventions. Tous les prénoms sont modifiés.
Dubaï fait rêver beaucoup de filles à Madagascar. Mais le rêve se transforme le plus souvent en cauchemar.
Angèle est partie à Dubaï
Angèle est bénéficiaire de l’association depuis 10 ans. Elle a 19 ans, nous semblait motivée par ses études, malgré un contexte familial perturbé.
Et puis, tout d’un coup, nous avons appris son départ pour Dubaï. Domestique, femme à « tout » faire, …
Nous sommes consternés par cette décision. Des filles malgaches partent travailler dans les pays du Golfe. Les mauvais traitements subis, proches de l’esclavage, sont très documentés, au point que le gouvernement de Madagascar a formellement interdit ces voyages. Le business, lucratif pour les passeurs, se poursuit néanmoins dans l’impunité. La famille, espérant de l’argent, est très fière de ce départ. Pour la famille, c’est une grande réussite sociale et la maman est venue nous remercier pour tout ce que nous avons fait ... alors que nous désapprouvons totalement.
Antoine
16 ans, en 6ème. Parcours scolaire chaotique (rétrogradé de deux classes au changement d’école de Mahavelona à Teen Mission, puis deux redoublements, beaucoup d’absences). Antoine s’absente pour aider sa mère (casser des pierres à la carrière) afin de nourrir les 7 petits frères et petites sœurs. Il dit vouloir continuer l’école et rêve d’être plus tard gendarme ou instituteur. Etre en 6ème à 16 ans est très difficile à vivre à cause des moqueries des autres élèves (4 ans plus jeunes), parfois des enseignants. La maman voudrait posséder des parasols pour les louer à la journée aux petits commerçants informels de la ville. Le projet est risqué, très peu rentable. Nous tentons de faire évoluer les idées de la maman. Situation quelque peu désespérante.
Mina
Fille de 13 ans, en CE. Souvent absente de l’école où elle ne se rend que pour la cantine à midi. Sinon, elle traine dans le quartier avec ses copines malgré les menaces de sa mère : « Je vais la tuer à coups de bâtons ». Nous avions accepté un projet économique de la maman pour un petit commerce de noix de cajou. Mais elle a préféré acheter des graines pour des cultures. Mauvais calcul : les semences ont été mises en terre à contretemps de la saison des pluies. En réalité, la maman cherche un homme ayant un peu d’argent pour marier sa fille …
Majunga ici, lhôtel de ville compte 200 000 habitants, la région 2 500 000. Et pas un seul psychologue en activité.
Juliette
Fille de 22 ans, en terminale. Niveau très faible (moyenne de 7 sur 20).
Juliette est mal dans sa peau, renfermée, s’exprimant peu. Elle a probablement subi des traumatismes physiques et psychologiques. Elle y fait allusion, sans réussir pour l’instant à les exprimer clairement. Un(e) bonne psychologue serait précieuse pour l’aider. Il n’y en a aucun(e) à Majunga.
Juliette voudrait faire des études supérieures, mais, consciente de son niveau et de son âge, elle parle aussi de travailler dans la couture.
Fidelia
Fille de 19 ans, scolarisée en 3ème. Moyenne de 6 sur 20. La logique voudrait qu’on lui dise de penser à travailler et d’arrêter ses études. Mais elle persiste et se montre persuasive dans sa volonté de poursuivre l’école. « J’aurai le brevet à la fin de l’année et je serai infirmière plus tard ».
Elle vit dans un autre monde. Quoique … A Madagascar, il est possible de faire l’impasse sur le Bac pour entrer en formation d’infirmière, moyennant quelques « arrangements ».
Arivelo
Fille de 12 ans, en CE. Assez bonne élève (plus de 12 de moyenne). La famille (une maman et 5 enfants) vit dans une misère totale. La maman se prostitue. Il n’y a souvent rien à manger à la maison. Quelques voisins aident un peu la famille, ayant pitié des enfants.
Nous donnons un secours exceptionnel d’une valeur de 4 euros chaque quinzaine, en plus des 15 kilos de riz mensuels. La maison est totalement délabrée. Un conflit avec le grand-père bloque tout projet de réhabilitation de cette maison. Nous avons dû nous contenter de poser une bâche sur ce qui fait office de toit pour la saison des pluies.